8.5.3
AFP
L’Agence France-Presse est la plus
ancienne agence de presse du monde. Créée en 1835 par Charles-Louis Havas, elle
dispose en 2005 de 2 000 salariés, dont 1 200 journalistes, et de 2
000 pigistes repartis dans le monde. L’AFP est régi par un statut particulier
défini par la loi du 10 janvier 1957. Selon l’article 1er de la loi,
l’AFP est un « organisme autonome doté de la personnalité civile et dont
le fonctionnement est assuré suivant les règles commerciales […] (Elle a pour
mission) de rechercher tant en France qu’à l’étranger les éléments d’une
information complète et objective et de les mettre à la disposition des usagers
». La société est administrée par un conseil d’administration comprenant, avec
le Président-directeur général, seize membres, dont trois représentants des
services publics usagers désignés par le Premier ministre, le ministre de
l’économie, des finances et de l’industrie et le ministre des affaires
étrangères. La majorité revient à la presse française qui dispose de huit
sièges. Deux sièges sont attribués aux membres du personnel et deux sièges
reviennent à des représentants de la radiotélévision publique.
Particularité
du statut et développement en ligne
La particularité de ce statut réside
sur le fait que l’AFP ne dispose pas de capital social et qu’elle est
dépendante pour son fonctionnement d’un financement public. Ceci parce que
l’Etat français constitue son premier client, via les abonnements contractés
par le service public (ministères, préfectures, ambassades), qui représentent
entre 40 et 50% de son chiffre d’affaires. Par ailleurs, le deuxième client de
l’agence, que sont les médias français, participe également à son
administration. Ce statut vise à l’origine à garantir l’indépendance de
l’agence « à l'égard de tous les pouvoirs politiques, économiques,
philosophiques ou religieux »[1].
Cependant, depuis la fin des années 90 et dans le contexte de la mondialisation
économique et de mutations corrélatives de l’industrie de l’information, cette
dépendance à l’égard de l’Etat, qui souhaite par ailleurs diminuer sa part de
financement, a posé une série de questions nouvelles. L’émergence de l’internet
grand public et l’engagement de l’AFP dans ce nouveau marché ont coïncidé avec
une période de difficultés financières, suivies par des bouleversements
internes.
L’AFP a créé son service Journal
Internet en français en 1996. A l’époque il s’agissait d’un embryon de
développement dans le réseau, en collaboration avec le portail Wanadoo de
France Télécom dont les responsables souhaitaient mettre en place un module
d’information à titre expérimental. Progressivement, durant les années 90, le
Journal Internet a été proposé à d’autres clients notamment de portails des
fournisseurs d’accès comme Infonie et de sites de presse comme ceux du Monde et de Libération. Auparavant, entre 1990 et 1994 un contrat de plan avait
permis à l’agence de rétablir sa situation financière et notamment de sortir
d’un déficit chronique de ses comptes. Ainsi, jusqu’en 1999 l’AFP présentait de
comptes équilibrés. Cependant, à la fin des années 90 le contexte économique de
libéralisation des marchés et l’émergence des analyses sur la « société de
l’information » et la « nouvelle économie » ont poussé les
pouvoirs publics à envisager une modification du statut de l’agence censée la
préparer au nouveau environnement concurrentiel. C’est ainsi qu’en avril 1999
Eric Giuily a été élu président de l’AFP, avec pour mission principale
l’élaboration d’un plan de développement.
La nouvelle direction de l’AFP a
présenté son avant-projet de plan stratégique de développement pour la période
2000-2005 en septembre 1999. Le projet en question était structuré autour de la
question de l’avènement du multimédia. L’émergence de l’internet grand public y
était envisagée comme un bouleversement majeur de l’activité de l’agence,
nécessitant des transformations structurelles profondes.
«
L’AFP doit faire face à un défi historique, celui de la révolution
technologique du monde de l’information, et elle ne peut pas l’ignorer. A
travers Internet et les divers multimédias se développent des offres qui
deviennent autant de concurrents potentiels des agences. Le danger, à terme, si
nous ne nous adaptons pas à ces nouvelles formes de concurrence, c’est de se
faire marginaliser dans notre métier principal. Ce qui est en cause, ce n’est
pas une forme de développement complémentaire, c’est le coeur même de notre
métier de base, qu’il s’agit de transformer pour devenir une vraie agence
mondiale multimédia, leader sur son marché. D’ici cinq à dix ans, il n’y aura
pas de grande agence mondiale généraliste qui ne serait pas multimédia. C’est
une mutation très profonde, mais c’est aussi une chance, car cela crée des
perspectives de développement considérables. Les sites Web, les portails ou les
intranets des entreprises offrent au grossiste que nous sommes une
diversification considérable de notre clientèle potentielle. C’est un marché en
pleine explosion »[2].
C’est
ainsi qu’a été préconisé de
transformer l’agence de presse en société anonyme
en faisant appel à des
partenaires tels que des opérateurs de systèmes de
diffusion, des fabricants de
programmes, des distributeurs ou encore des grands groupes industriels
et
financiers. De cette façon, comme dans les discours sur la
« société de l’information »
précédemment examinés, l’avènement de
l’internet grand public est envisagé
comme une transformation technocentrée et inéluctable de
l’économie dans son
ensemble et de l’industrie de l’information en particulier.
En l’occurrence,
l’internet est ici présenté comme un argument en
faveur d’une libéralisation du
statut de l’AFP, avec l’introduction de partenaires
privés en son sein, seul
moyen selon son directeur de « sauver »
l’agence. La proposition de
création d’une filiale dédiée aux nouveaux
marchés du multimédia s’apparente à
la stratégie adoptée par France Télécom
avec la création de la filiale Wanadoo
et son introduction en Bourse. Une orientation qui a été
depuis complètement
révisée par l’opérateur de
télécommunications.
« La
situation financière est saine, mais l’AFP dégage une marge d’autofinancement
qui lui permet à peine de renouveler l’outil existant. Ce n’est pas suffisant
pour faire le bond indispensable vers l’outil multimédia. Si on ne fait que
prolonger la tendance, nous sommes condamnés à la marginalisation sur le marché
de l’information. Au contraire, le plan veut donner à l’agence les moyens de
son développement. Il a été dit clairement par le conseil d’administration de
l’AFP, le 24 juin 1999, que ce n’était pas du côté de l’Etat ou de la presse
française que nous trouverions le surcroît de ressources nécessaires. Il faut
donc le trouver à l’extérieur. Cela ne peut se faire que par des partenariats
avec des entreprises publiques et privées. Il ne s’agirait pas de partenariats ponctuels,
mais d’un partenariat stratégique global, associant ces partenaires à notre
développement et à la mise en oeuvre du plan […] Plusieurs solutions sont
possibles. La première serait de reconnaître l’existence d’un capital social,
et, ensuite, d’y faire entrer des partenaires. Une autre solution pourrait être
la création d’une filiale associant des partenaires publics et privés, en
veillant qu’elle ait des liens suffisamment étroits avec l'AFP pour qu’elle
soit le vecteur principal de financement et de développement »[3].
La stratégie tournée autour du
multimédia a été adoptée par l’AFP sous la direction d’Eric Giuily, notamment
par la mise en place d’un service en ligne baptisé AFP Direct. Il s’agit d’un
service de consultation en temps réel de la production de l’agence. En échange
d’un abonnement, les clients du service disposent d’un accès privé au fil
complet de dépêches de l’AFP, avec la possibilité de les trier par zones
géographiques d’origine, par type d’informations et par niveau d’urgence. Par
ailleurs, grâce à un moteur de recherche les abonnés peuvent également accéder
aux archives de dépêches mais aussi paramétrer un système d’alerte par courrier
électronique. Le service, essentiellement à destination de professionnels, se
distingue de la fourniture de contenus aux médias puisqu’un accès aux dépêches
par le biais d’AFP Direct n’équivaut pas à un droit de reproduire les
informations pour un traitement parallèle. Cependant, en dehors des initiatives
ponctuelles comme AFP Direct, le plan de développement global de la direction a
été particulièrement mal accepté par les journalistes de l’agence qui se sont
mis en grève en septembre 1999 contre ce qui constituait selon leurs
représentants syndicaux une tentative de « privatisation rampante »[4].
Mouvement
social et « contrat d’objectifs »
Suite à la crise provoquée par ce
mouvement social, le directeur de l’agence a démissionné et a été remplacé par
Bertrand Eveno en octobre 2000. La nouvelle direction a crée un poste
spécifique de directeur du développement multimédia où a été nommé Yves de
Saint-Jacob. Ce dernier a été chargé de rationaliser les dépenses notamment au
sein de la rédaction multimédia, ce qu’il a fait par le biais d’un plan social
concernant les effectifs de la rédaction qui produit le Journal Internet. Cette
initiative a provoqué une nouvelle grève des journalistes de l’AFP en novembre
2001.
La
crise économique des années
2001-2002 a fragilisé la situation financière de
l’agence dont les pertes sont
passées de 4M d’euros pour l’exercice 2001 à
près de 20M d’euros pour l’année
suivante. En raison de cette évolution, la direction de
l’agence et les
représentants de l’Etat ont signé, le 20 novembre
2003, un « contrat
d’objectifs et de moyens ». L’Etat
français s’est engagé à augmenter les
moyens financiers alloués à l’AFP pour 2004, les
abonnements contractés
s’établissant à 103,2M d’euros, soit une
progression de 3% par rapport à leur
montant pour 2003. De son coté, la direction de l’AFP
s’est engagée à consentir
un effort de gestion visant à maîtriser les
dépenses, notamment par la
stabilisation de la masse salariale. Cette politique de rigueur a
été vivement
critiquée par les salariés qui ont mis en avant leur
crainte de voir le statut
d’agence de presse mondiale de l’AFP mis en cause. Ceci
à cause d’une politique
de sous-traitance adoptée par la direction notamment pour
l’activité de l’AFP à
l’international. L’objectif de cette politique étant
de concentrer les moyens
de l’agence sur le marché européen. Cette situation
conflictuelle a abouti a
provoqué, en octobre 2004, un nouveau mouvement de grève
des journalistes de
l’AFP en France.
Le
fonctionnement actuel du Journal Internet AFP
En 2005, l’AFP effectue des Journaux
Internet en français, en anglais, en allemand, en espagnol, en arabe, en
chinois et en japonais, les deux derniers étant sous-traités auprès de
partenaires. La rédaction parisienne, qui a la charge du journal en français,
est constituée d’une dizaine de journalistes et complétée par des
correspondants au sein des desks locaux.
L’activité principale de la rédaction multimédia consiste essentiellement en la
sélection et le packaging de produits
fournis par l’AFP. La notion de packaging
signifie la mise en commun d’un certain nombre d’éléments d’information qui
sont à l’origine séparés. Il s’agit de dépêches en texte, d’images fixes,
d’infographies, de liens hypertexte et éventuellement de vidéos. Le travail
consiste à faire une page multimédia à partir d’un élément isolé qui est le
plus souvent un article en texte. Les éléments utilisés par la rédaction
multimédia ne sont qu’une partie de la production d’information de l’AFP.
« La
tâche des journalistes c’est de surveiller la production de tous ces objets,
d’en faire une sélection, puisque évidemment on ne donne pas aux clients
internet, toute la production AFP, c’est une sélection, parce que ça ferait
évidemment scier la branche sur laquelle nous sommes assis. Cette sélection est
rafraîchie et actualisée autant qu’il le faut, à tout moment tout au long de la
journée, donc il y a ce travail là et puis il y a le travail d’illustration et
de packaging. Le packaging signifie qu’à partir d’un texte ou d’une photo on va
faire une véritable page multimédia. Par exemple la page la plus complète,
parce qu’elles ne sont pas toutes comme ça, peut être sur l’info du jour. Je
prends l’exemple de l’élargissement de l’Europe à 25, nous avions une longue
synthèse d’environ 800 mots qui incluait en plus trois photos, un graphique
statique, un graphique en format flash, une dizaine de liens hypertexte vers de
la documentation sur différents aspects de l’élargissement, une vidéo et puis
des liens vers des sites extérieurs qui complètent l’information, voilà ce que
j’appelle un packaging ». Pascal
Taillandier, responsable de la rédaction multimédia d’AFP, mai 2004
Le
travail des journalistes de la
rédaction multimédia comprend plusieurs étapes.
Dans un premier temps, il y a
une correction et une vérification supplémentaire de
l’information. Ceci parce
que le Journal Internet est un produit qui souvent arrive directement
au
consommateur final. Il n’y a donc pas de vérification
supplémentaire de la part
du client comme c’est le cas pour les dépêches
à destination des médias
traditionnels. Dans un deuxième temps, il y a une
légère réécriture de la
dépêche
avec la simplification de sources et la mise en contexte de
l’évènement décrit.
Enfin, dans un troisième temps les journalistes se chargent de
rédiger le titre
sous lequel la dépêche sera diffusée. La
rédaction du titre constitue une étape
décisive parce que c’est l’élément qui
restera inchangé pour toutes les
utilisations de la dépêche et ses adaptations à des
supports différents (web,
SMS, MMS, écrans publics). Il s’agit du plus petit
dénominateur commun qui
« présente » l’information aux
différents publics.
Dans le processus de sélection des
éléments qui font partie du Journal Internet interviennent également de
critères thématiques, qui visent à orienter la production vers des sujets qui
intéressent particulièrement les internautes comme la science, la culture ou
l’art de vivre. Effectivement, la création d’un service à destination des sites
internet a été accompagnée par la mise en place de nombre de nouvelles
rubriques (Médias, High-Tech, Médecine/Santé, Sciences/Environnement,
Culture/Art de vivre). Il s’agit d’un mouvement de spécialisation poussée des
fils de l’AFP, renforcé par la montée en puissance des thématiques magazine au
détriment des informations généralistes.
A
l’image de Reuters, la distribution
des contenus se fait essentiellement sous le format dynamique NewsML.
Ceci
permet de mettre en place plusieurs modes de distribution selon la
demande des
clients. Ainsi, le premier niveau de choix se situe dans la
réception des fils
d’information. Selon leurs préférences, les sites
clients peuvent intégrer
directement le flux de dépêches, c’est
habituellement le cas des portails
généralistes, ou l’intercepter afin de le modifier,
comme dans le cas des
sites-médias. Les clients peuvent également reproduire le
rubriquage effectué
par les journalistes de l’AFP, comme par exemple Wanadoo, ou
éclater le fil de
dépêches en différentes rubriques selon leurs
propres critères à l’image de
Yahoo. Depuis la création de la rédaction
multimédia, l’AFP s’est engagée de
manière croissante dans un travail d’édition
consistant à définir une
hiérarchie parmi les sujets traités. Ainsi, les
journalistes de l’agence
assignent une place à chaque dépêche à
l’intérieur de cette hiérarchie selon
l’importance qu’ils accordent à
l’évènement traité. De cette façon
les clients
peuvent reproduire cette sélection ou diffuser
l’information « au fil de
l’eau », les dépêches les plus
récentes remplaçant les précédentes.
(Non) diffusion grand public et fonction de
« premier client »
Si globalement les modes de
fonctionnement des rédactions multimédias respectives de Reuters et de l’AFP
sont similaires, il en va autrement en ce qui concerne la stratégie développée
autour de leurs sites internet. Alors que Reuters s’efforce de constituer un
portail d’information visant de dégager de recettes de la vente d’abonnements
mais également de la publicité, le site de l’AFP demeure essentiellement une
vitrine de ses activités. Le positionnement de grossiste est donc privilégié et
même renforcé sans qu’un effort d’envergure soit fait pour toucher directement
le grand public. Ceci d’une part en raison du manque des ressources nécessaires
à un tel investissement, mais également à cause des réticences des éditeurs,
clients de l’agence, qui craignent cette nouvelle concurrence. Cependant,
depuis 2005, on trouve sur le site de l’AFP les dix dépêches les plus
importantes du moment, ainsi qu’un fil RSS, en libre accès.
« Le
site afp.com c’est un site vitrine de la compagnie où il y
a très peu
d’information. Si vous pensez à Reuters qui a une nouvelle
stratégie maintenant
qui est de tout faire passer par son portail, ce n’est pas le
choix de l’AFP,
au moins pour l’instant. Nous restons pour l’instant
grossiste, c’est vrai
qu’on est éditeur d’une certaine façon
puisque nous proposons une sélection et
une hiérarchisation, mais ce n’est pas notre métier
principal. Il y a d’autres
voies qu’on explore, c’est-à-dire
l’utilisation des flux multimédia pour des
clients médias, par exemple de petits journaux ou magazines qui
n’ont pas les
moyens d’avoir d’énormes flux de texte,
d’énormes flux de photos et de faire
eux mêmes leur sélection, leur choix, on peut
déjà leur proposer une
pré-sélection, une pré-édition, une
sous-traitance qui va encore plus loin, ce
chantier est en cours actuellement. Mais bon, l’AFP étant
ce qu’elle est avec
des administrateurs en partie de la presse, ils verraient d’un
mauvais oeil
qu’on les remplace totalement. Déjà au
départ le journal internet ça a été
accepté, certains acteurs de la presse française en sont
d’ailleurs clients,
mais il y a eu quand même au départ des réactions.
Certains journaux nous ont
dit : attendez vous n’allez pas faire notre métier
à nous, vous n’êtés pas
éditeur. Bon on l’est devenu d’une certaine
façon mais on y a été amené à cause
de tout un nouveau marché qui l’exigeait ». Pascal Taillandier – AFP
Selon les responsables de la rédaction
multimédia, cette dernière assume le rôle de « premier client » de
l’agence. Ceci signifie que toute la production de l’AFP transite par la
rédaction multimédia avant même d’être envoyée aux clients. Ce processus
implique une coordination accrue de la part de différents services qui ont dû
rendre compatibles leurs méthodes de référencement afin de faciliter le
traitement de la production pour le Journal Internet. De cette façon, la
rédaction multimédia constitue un point central dans le processus de production
et de diffusion de l’information en étant en liaison directe avec toutes les
composantes de l’agence.
« Là
aussi ça prend du temps, mais il est vrai qu’il y a de
plus en plus des
synergies, des passerelles. Pendant très longtemps par exemple
les services
texte et photo de l’AFP ont travaillé de façon
parallèle à tel point que le
référencement des documents n’était pas fait
de la même façon, tout ça évolue
petit à petit. Le multimédia exige qu’un client
puisse venir sur une
plate-forme avec un mot-clé et obtenir tous les documents
concernant la même
information, ça aussi on travail dessus. Dans ce sens, la
nécessité de penser
multimédia fait qu’on développe des synergies entre
les différents services. Il
est clair que les équipes multimédia se
considèrent au sein de l’AFP comme les
premiers clients de l’agence, c’est là où on
voit en direct les flux
d’information, avec des besoins spécifiques, c’est
par là que passe une tentative
de coordination de la production. On se considère donc comme les
premiers
clients de l'AFP. Pourquoi ? Parce que c’est là où
on voit ce qui va et ce qui
ne va pas, des exemples il y en a des dizaines, mais il est vrai
qu’on réagit
en tant que client : ils nous font ça pour telle rubrique, on
s’aperçoit qu’il
manque un élément, on leur pose la question pour savoir
pourquoi il n’y a pas
ça, et en permanence nous sommes en relation avec la
rédaction en chef, on a un
rôle en tant que premier client ». Pascal
Taillandier – AFP
L’histoire récente de l’AFP nous
permet de constater que la mise en place et le développement des rédactions
multimédia s’est effectué dans un climat social particulièrement difficile.
Ceci d’autant plus que l’engagement de l’agence sur le marché de l’internet a
été utilisé comme un argument justifiant le changement de statut et, in fine, la privatisation de la société.
D’un autre coté, les représentants de la presse qui font partie du conseil
d’administration de l’AFP ont également imposé des contraintes supplémentaires
en ce qui concerne le développement de l’agence en ligne, notamment par le
biais de son propre site internet. Ceci parce qu’une telle évolution placerait
le portail de l’AFP en concurrence directe avec les sites de la presse. Par
conséquent, ces intérêts contradictoires ont rendu problématique la prise
d’initiatives dans le domaine de l’internet. Néanmoins, de par l’éventail très
large et la qualité des informations qu’elle délivre l’AFP demeure un
partenaire incontournable pour la quasi-totalité des sites d’information
français. Parallèlement, l’AFP a été à la pointe de la défense des droits
d’auteur sur l’internet par le biais d’une série de procès attentée à des sites
internet pour utilisation abusive de ses contenus au début des années 2000[5]. Le
point culminant de cette politique a été la plainte déposée contre Google aux
Etats-Unis au sujet de son service Google News en mars 2005. Enfin, la
constitution de la rédaction multimédia a été l’occasion d’une réorganisation
interne de l’agence. Le Journal Internet constitue dorénavant une sorte de
filtre à travers lequel passe toute la production de l’agence, ce qui a
contribué au décloisonnement des différents services et à la normalisation du
processus de production de l’information.
[1] Source : http://www.afp.com
[2] Interview d’Eric Giuily, directeur de l’AFP, accordée
à Jean-Jacques Bozonnet et Frederic Chambon, Le Monde, 15 septembre 1999, (cf.
Annexe 16).
[3] Ibid.
[4] Source : « L’AFP en grève contre le plan du
PDG », Claude Baudry, L’Humanité, 22 septembre 2002.
[5]
Voire à ce sujet : « L’AFP fait condamner
CFoot pour utilisation illicite de ses informations » et
« France Fun
ferme après un référé déposé
par l’AFP », Philippe Guerrier, Journal du
Net, respectivement 9 septembre 1999 et 10 janvier 2000.
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