DEUXIEMME PARTIE : Les stratégies

et les enjeux des acteurs

 

Chapitre 5 : « Nouvelle économie » et information en ligne

Depuis le milieu des années 90, l’émergence de l’internet grand public a donné lieu à des nombreuses analyses sur la question de la « nouvelle économie ». Il s’agissait en quelque sorte d’une tentative de transposition des principes qui régissent la « société de l’information » dans le domaine purement économique, afin de démontrer combien la « révolution numérique » allait modifier les rapports économiques et industriels dans tous les secteurs. Les contributions en question se sont efforcées de relier la généralisation de l’utilisation des techniques d’information et de communication (TIC) dans le système productif avec la période de forte croissance ininterrompue qui a caractérisé l’économie américaine jusqu’au début des années 2000. De ce point de vue, le secteur des TIC, et particulièrement celui de l’internet, a été envisagé comme le principal moteur de l’économie mondiale pour les années à venir, annonçant du même coup la fin du paradoxe de Solow[1].

Dans le présent chapitre nous allons nous efforcer de confronter les apports des sciences économiques en ce qui concerne le marché de l’internet aux particularités des industries culturelles qui caractérisent le secteur de l’information. Dans un premier temps nous allons présenter brièvement quelques contributions d’économistes sur la question de l’avènement d’une « nouvelle économie », afin de démontrer le flou qui entoure cette notion. Parallèlement, nous allons examiner le contexte dans lequel des approches scientifiques jusqu’alors marginales, comme celle de l’économie de l’information, sont devenues centrales dans l’analyse des conditions économiques qui régissent le fonctionnement de l’internet. Ce qui a conduit certains acteurs à négliger les contraintes bien connues de « l’ancienne » économie et a abouti, en combinaison avec d’autres facteurs, à la crise des années 2000-2001.

Dans un deuxième temps, nous allons examiner la portée d’un certain nombre d’apports de la théorie économique pour notre objet de recherche, à savoir l’information en ligne. Il s’agit de la question de l’informatisation progressive du travail et de ses implications en ce qui concerne l’augmentation de la productivité dans les industries culturelles. Il s’agit également de la numérisation de l’information et de ses effets sur la structure de coûts de l’information en ligne, notamment en ce qui concerne sa diffusion. Enfin, il s’agit aussi de la mise en réseau des contenus d’information et les incidences de celle-ci sur l’environnement concurrentiel des médias en ligne. Nous allons fermer ce chapitre par l’examen de l’interactivité en tant que caractéristique constitutive de l’internet et de son rôle dans la mise en place de modèles économiques fondés sur le financement indirect.       

 



[1] En 1987 l’économiste et Prix Nobel Robert Solow remarquait que l’informatique est partout sauf dans les statistiques de la productivité, autrement dit que les effets attendus en termes d’efficacité de l’informatisation progressive de l’économie américaine ne sont pas observables de façon empirique. Source : Solow Robert, « We’d better watch out », New York Times Book Review, 12 juillet 1987.

 

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